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Anthologie poètique
16 mars 2011

Aube

Aube

J'ai embrassé l'aube d'été.

Rien ne bougeait encore au front des palais. L'eau était morte. Les camps d'ombres ne quittaient pas la route
du bois. J'ai marché, réveillant les haleines vives et tièdes, et les pierreries regardèrent, et les ailes
se levèrent sans bruit.

La première entreprise fut, dans le sentier déjà empli de frais et blêmes éclats, une fleur qui me dit son nom.

Je ris au wasserfall blond qui s'échevela à travers les sapins : à la cime argentée je reconnus la déesse.

Alors je levai un à un les voiles. Dans l'allée, en agitant les bras. Par la plaine, où je l'ai dénoncée au coq.
A la grand'ville elle fuyait parmi les clochers et les dômes, et courant comme un mendiant sur les quais de marbre,
je la chassais.

En haut de la route, près d'un bois de lauriers, je l'ai entourée avec ses voiles amassés, et j'ai senti un peu
son immense corps. L'aube et l'enfant tombèrent au bas du bois.

Au réveil il était midi.

 

Arthur Rimbaud, Illuminations, 1873-1875.

 

 

J'aime beaucoup ce poème de Rimbaud car il est doux et apaisant. Par la qualité de son écriture, il nous fait presque sentir les détails auditifs, olfactifs, visuels et tactiles, créant une atmosphère calme et sereine. Rien qu'en lisant ces lignes, je m'imagine un matin d'été marchant dans l'herbe fraiche, et c'est ce que je trouve admirable dans ce poème; la capacité a transmettre des sensations. Ici, Rimbaud nous transporte doucement par la force de ses mots dans l'univers qu'il construit. De plus, j'aime que ce poème soit rédigé à la façon d'une courte histoire, comportant un début, une fin, et un déroulement, marqués dans le temps. Cela permet encore plus de laisser son imagination vivre le poème.

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